Responsabilité Sociétale des Entreprises : Quelques Notions

Du Développement Durable à la Responsabilité Sociétale des Entreprises

 

Le Développement Durable est un développement qui satisfait les besoins présents sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs, selon les termes du Rapport Bruntland de 1987.

Un tel développement doit être tout à la fois : socialement responsable, environnementalement tolérable et économiquement performant.

Un développement durable se doit donc de traiter simultanément 3 sphères : la sphère sociale, la sphère environnementale et la sphère économique. C’est à dire les « People, Planet, Profit » de la triple Bottom Line popularisée par John Elkington.

Au sein de l‘entreprise, People recouvre en fait 2 populations : d’une part, les femmes et les hommes salariés de l’entreprise ; d’autre part, les femmes et les hommes de toutes les entités extérieures à l’entreprise avec lesquels elle interagit directement ou indirectement.

Les 3 sphères du développement durable deviennent donc les 4 sommets de la pyramide de la RSE, de la Responsabilité Sociétale d’Entreprise, c’est à dire de la contribution de l’entreprise au développement durable de notre planète dans le cadre de son activité, avec ses moyens et ses ressources.

Les 4 sommets de cette pyramide correspondent aux 4 performances visées par l’entreprise, c’est-à-dire être performant : socialement, sociétalement, environnementalement et économiquement.

La performance globale de l’entreprise

En effet, ces quatre performances sont indissociables de la performance globale de l’entreprise (le pourquoi de la RSE).

Pour atteindre cette performance globale, l’entreprise, quelle que soit sa taille, avec l’engagement de tous en son sein et en premier de sa Direction Générale, met en place et développe une démarche RSE. Cette démarche sera coordonnée généralement par sa Direction, son Responsable, en charge du Développement Durable.

Pour comprendre cette démarche, les principaux concepts de la Responsabilité Sociétale d’Entreprise (la RSE c’est Quoi ?), nous nous appuierons dans les prochains articles sur un schéma bâti autour de cette pyramide de la RSE. Nous verrons tout d’abord que cette pyramide RSE, cette démarche RSE, ne sera robuste que si elle est construite sur des fondations solides.

Pour accroître sa performance globale, c’est-à-dire à la fois sa performance économique et sa performance RSE, l’entreprise doit mettre en place et développer une démarche RSE. Mais cette démarche, pour être efficace, robuste, sincère et crédible, doit s’appuyer sur des fondamentaux.

Ces fondamentaux sont tout d’abord 3 piliers :

  • la Vision (et/ou la Mission) de l’entreprise, du chef d’entreprise et dans laquelle chacun dans l’entreprise se reconnaît,
  • les Valeurs, généralement définies par la Direction Générale de l’entreprise,
  • l’Ambition RSE proposée puis mise en place par la direction Développement Durable avec l’ensemble des acteurs de l’entreprise.

La Vision de l’entreprise, ou la Raison d’être de l’entreprise, qui peut être complétée par une signature, doit en quelques mots permettre à tous de comprendre ce qu’est et veut être l’organisation, son état futur et désirable et sa contribution dans son environnement.

Une vision ambitieuse au-delà de donner un cap, engage la crédibilité de l’entreprise. Une entreprise qui définit sa vision comme l’apport de la santé ou d’une énergie responsable au plus grand nombre sous-tend ainsi et guide la stratégie et les actions de l’ensemble de l’entreprise dans le monde entier.

Les Valeurs, les principes de comportement et d’action, doivent permettre de guider chacun dans l’entreprise, dans ses décisions, dans un environnement de plus en plus complexe, et notamment lors de décisions difficiles à prendre pour lesquelles il n’existe pas de guide, de règles claires. Elles seront d’autant plus utiles qu’elles seront partagées et comprises, faites siennes par chacun dans l’entreprise, ce qui nécessite temps et efforts.

Nous verrons brièvement au cours des prochains articles comment la Direction Développement Durable s’attache et contribue à définir l‘Ambition RSE de l’entreprise, le 3ème pilier.

Les fondations d’une démarche RSE

Les 3 piliers de cette fondation doivent ensuite être consolidés par 2 dalles.

La 1ère dalle concerne le respect des textes, qu’ils soient légaux, la hard law, la Conformité Réglementaire ; ou du domaine de la soft law comme les Référentiels RSE tels que l’ISO 26000, le Pacte Mondial, la GRI et comme les Chartes Mondiales de l’ONU, l’OCDE, l’OIT, que l’entreprise va s’engager à respecter et promouvoir.

Ces engagements pris par la Direction de l’entreprise et l’ensemble de ses entités cadrent les thèmes de la RSE et de son reporting. Respecter chartes et réglementations est un incontournable de la RSE.  Au-delà des règlementations locales elles appliqueront globalement les réglementations les plus exigeantes dans leur politique RSE, ainsi que les meilleures pratiques qu’elles définiront dans leurs politiques responsables, comme elles appliquent les best technologies pour leur politique d’excellence opérationnelle.

La 2ème dalle est celle de la Gouvernance de l’Entreprise qui doit permettre d’assurer un management responsable de l’entreprise par sa Direction Générale ; et aussi de l’Éthique de l’entreprise qui, au-delà de son code de conduite, doit être connue, comprise par tous, pilotée, gouvernée, contrôlée et reportée. Cette éthique couvre, bien sûr, tous les aspects de la RSE. Elle nécessite la mise en place d’un vrai Système de Management comme pour la sécurité, comme pour l’environnement.

Ce n’est que lorsque ces fondations sont en place que l’entreprise peut dérouler une politique RSE. Une démarche RSE robuste et crédible, démarche que nous détaillerons dans la prochaine séquence. Sans cela la pyramide de la RSE est bâtie sur du sable.

Malheureusement nous connaissons quelques exemples d’entreprises qui ont oublié ces fondamentaux telle cette grande multinationale du secteur de l’automobile. Heureusement ces exemples ne sont pas représentatifs de l’engagement de nombreuses entreprises et de leurs salariés qui œuvrent tous les jours à développer leur responsabilité sociétale dans une démarche d’amélioration continue.

Comme on l’a vu plus haut, lorsque les fondations sont en place, l’entreprise peut dérouler une politique RSE, une démarche RSE robuste et crédible : elle peut alors construire sa pyramide de la RSE sur du solide.

 

Dans son écosystème l’entreprise interagit principalement avec 2 forces externes :

  • d’une part les Megatrends ou méga-forces, les grands enjeux du futur pour notre planète, risques sociétaux, géopolitiques, environnementaux dont le climat bien sûr, mais aussi grandes tendances telles qu’urbanisation ou digitalisation croissantes ; tendances souvent interdépendantes, entraînant des effets de type « cocktail »,
  • d’autre part les Parties Prenantes de l’entreprise, qu’elle recense, « cartographie » selon d’une part de l’importance de ces parties prenantes pour l’entreprise et d’autre part de leur relation avec l’entreprise, de la connaissance par l’entreprise de ces parties prenantes, de leurs attentes.

Selon l’ONU, les Objectifs de Développement Durable (ODD) sont une approche des Megatrends auxquels nombres d’entreprises raccordent leurs actions RSE, voire qui structurent leurs axes d’engagements RSE.

Risques et Opportunités

Cet écosystème est à la fois source de Risques et d’Opportunités pour l’entreprise. Une entreprise a des moyens et des ressources limités : elle ne peut traiter tous ces enjeux simultanément. Elle affecte donc prioritairement ses ressources aux enjeux RSE les plus significatifs, ce qui ne signifie pas se comporter de façon irresponsable sur les autres enjeux moins importants.

Pour cela, elle analyse ses risques et opportunités en termes d’occurrence et d’importance, tant pour l’entreprise que pour ses parties prenantes. Elle se pose aussi la question de la maîtrise de ces risques. Un risque moyen, mal maîtrisé, pourra nécessiter plus d’actions qu’un risque important très bien maîtrisé.

Analyse de matérialité

À partir de ces analyses menées en interne, en utilisant des listes d’enjeux selon les sphères sociales, environnementales et sociétales, tels que par exemple les domaines d’action de l’ISO 26000, à partir également d’un benchmark des communications de ses confrères, l’entreprise enquête auprès de ses parties prenantes pour connaître leurs attentes, leurs priorités. Cette écoute et ce dialogue contribuent à réaliser l’Analyse de Matérialité des enjeux RSE de l’entreprise, à définir ses enjeux RSE prioritaires.

Deux livrables principaux sont issus de cette analyse :

  • la Matrice de Matérialité, représentation graphique qui permet selon l’axe d’importance pour l’entreprise et l’axe d’importance pour les Parties Prenantes de mettre en évidence les enjeux jugés importants par les 2 acteurs, mais aussi de s’interroger sur les appréciations différentes portées par l’entreprise et ses parties prenantes sur tel ou tel thème, et de savoir détecter les signaux « faibles » d’enjeux potentiellement forts dans le futur.
  • l’Ambition RSE de l’entreprise qui sera déclinée en axes d’engagements RSE formalisés par de courtes phases gravant dans le marbre les axes prioritaires de la politique RSE de l’entreprise.

Les axes de l’ambition RSE de l’entreprise recouvrent les enjeux RSE principaux (risques et opportunités) qui font l’objet de politiques, voire de plans de diligence, d’actions correspondantes, d’indicateurs de suivi de ces actions, et d’objectifs à moyen-long terme pour les indicateurs clés de performance (ou KPI en anglais).

L’entreprise est ainsi armée pour, non seulement préciser, mais aussi faire évoluer son modèle d’affaires (son business model) c’est à dire son utilisation des ressources, ses impacts, sa place dans la chaîne de valeur et bien sûr aussi son activité, sa stratégie en surfant sur les nouveaux enjeux et les attentes de ses parties prenantes.

L’entreprise peut développer sa démarche RSE, la partager avec ses collaborateurs et ses parties prenantes, être en accord avec sa raison d’être, contribuer à la création de valeur partagée et accroître sa performance globale.

En effet, la définition par l’entreprise de son ambition RSE (en accord avec sa vision, sa raison d’être, ses valeurs, son écosystème, les attentes de ses parties prenantes, l’analyse de ses risques et opportunités), le déploiement de sa démarche RSE intégrée dans sa stratégie globale sur des fondations solides (respect des hard et soft laws, éthique, gouvernance responsable) contribuent à la création de valeur partagée et à l’accroissement de la performance globale de l’entreprise.

Pourquoi une Politique RSE ?

Pourquoi toute cette démarche ?

  • Pour la création de valeur à la fois pour l’entreprise et pour ses parties prenantes.
  • Pour le développement de nouvelles activités de nouveaux produits et services, pour être performant économiquement,
  • Pour attirer et garder les talents, développer la fierté de travailler dans l’entreprise, pour être performant socialement,
  • Pour limiter les impacts environnementaux et les risques associés pour l’entreprise, pour développer et proposer des solutions aux enjeux du développement durable, pour être performant environnementalement,
  • Pour répondre aux attentes de l’ensemble de ses parties prenantes, agir de manière responsable dans l’ensemble de ses activités yc dans sa supply chain, pour être performant sociétalement.

Ce que Michael Porter a popularisé sous le terme de shared value, de valeur partagée, couvre la création de valeur pour l’entreprise et pour son écosystème.

La création de valeur

La création de valeur par l’entreprise tient tout d’abord à son existence, quelle que soit son activité, notamment :

  • L’entreprise est pourvoyeuse d’emplois pour ses salariés, et au-delà,
  • L’entreprise développe l’activité de ses fournisseurs et sous-traitants et contribue au développement du tissu économique,
  • L’entreprise fournit à ses clients des services, des produits qui leur permettent d’accroître leur activité et répondre aux besoins de leurs clients,
  • L’entreprise paye des impôts, des taxes, des charges sociales, ainsi que ses salariés et partenaires et ils contribuent ainsi au financement des services publics de la nation,
  • L’entreprise paye des intérêts à des banques et organismes financiers qui financent son développement et celui du tissu économique,
  • L’entreprise paye éventuellement des dividendes à des actionnaires, dont des particuliers ou des fonds de pension.

Par ailleurs, la création de valeur par l’entreprise va au-delà de sa simple existence, par exemple par :

  • Les solutions qu’elle apporte pour répondre à des enjeux du Développement Durable,
  • Les financements, mentoring, mécénats yc de compétence, qu’elle développe pour l’économie sociale et solidaire, l’éducation, les sports … ou pour lesquels elle supporte les actions volontaires de ses salariés,
  • Le soutien qu’elle apporte à de jeunes pousses, à d’autres entreprises dans leur développement, aux territoires où elle opère, en dehors de ses activités directes.

Les bénéfices pour l’entreprise

Les actions responsables de l’entreprise, qu’elles soient dans les sphères sociales, sociétales ou environnementales, contribuent à sa performance économique. L’étude publiée par France Stratégie en Janvier 2016 et réalisée auprès de 8.500 entreprises dont de nombreuses PME, conclut que « quelles que soient la mesure de la performance économique et la dimension de la RSE, on observe un écart de performance économique d’environ 13 % en moyenne entre les entreprises qui mettent en place des pratiques RSE et celles qui ne le font pas ».

Mais plus que ce chiffre global, quel qu’il soit, un point majeur réside dans le fait que cet écart de performance soit de « 20 % pour la dimension ressources humaines » parmi les pratiques RSE.

Les impacts positifs d’une démarche RSE contribuent à l’acceptation de l’entreprise par ses parties prenantes, par la société civile, lui assurent sa « license to operate ». Ils font aussi sentir leurs effets sur l’ensemble de l’entreprise (yc dans les statistiques sécurité, absentéisme …) et dans ce qui est plus difficilement mesurable (présentéisme, bien-être au travail, engagement…) mais tout aussi important.

Une ambition RSE affirmée, concrétisée par ses axes d’engagements et les actions afférentes années après années, partagée par tous au sein de l’entreprise, constitue un puissant moteur non seulement pour répondre aux attentes des parties prenantes externes, mais aussi pour la motivation, l’engagement, la recherche de sens des collaboratrices et collaborateurs au sein de l’entreprise qu’ils soient permanents, contractuels, temporaires.

Enfin, en dehors des très grandes agglomérations et notamment pour les ETI et PME, il n’est pas toujours facile d’attirer les collaborateurs les plus compétents et performants. Les générations actuelles sont de plus en plus sensibles à la responsabilité sociétale.

C’est un des critères qui peut les amener à choisir une entreprise et encore plus à ne pas chercher à la quitter, contribuant ainsi durablement à la performance globale de l’entreprise.

D’où l’importance d’une démarche RSE claire, robuste, sincère, adaptée à l’entreprise, répondant aux attentes de ses parties prenantes, bâtie sur des fondations solides et largement partagée.

Article rédigé par : Gérard Langlais – Consultant ARCLÈS

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