Interview : François Giger

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Racontez-nous votre carrière en quelques mots (les postes significatifs)

Issu d’une famille d’ingénieurs et de juristes, j’ai choisi d’orienter ma carrière sur le développement de projets innovants à l’international dans le secteur de l’énergie.

Après des expériences dans l’extraction de charbon, au fond, dans la Ruhr, puis dans la pétrochimie canadienne, j’ai dirigé des équipes franco-indonésiennes de prospecteurs d’uranium au milieu de Bornéo puis j’ai assisté les conseillers nucléaire et scientifique de l’Ambassade de France au Japon.

Ma première affectation administrative m’a assigné la responsabilité du contrôle de la pollution industrielle dans la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur à la tête d’une équipe d’une vingtaine d’ingénieurs.

Ensuite, chef du projet forage horizontal à l’Institut Français du Pétrole, j’ai conduit des opérations pionnières, sur sondes de forage, dans le champ de Lacq. J’ai également développé l’ingénierie réservoir pour l’exploitation des gisements d’hydrocarbures avec des puits horizontaux ; sujet de mon travail de thèse, qui a débouché sur les premières applications mondiales en mer Adriatique et au Texas.

Ingénieur conseil à la BNP pour le secteur Mines et Hydrocarbures, j’ai évalué, sur les aspects technique, financier et stratégique, des projets en développement au Gabon et en Australie ainsi que l’activité d’entreprises opérant dans le secteur.

J’ai ensuite dirigé le Bureau du Transport des Matières Dangereuses au Ministère chargé des transports. J’ai alors mis en place le Comité Transport au sein de l’AFAQ (Association Française pour l’Assurance Qualité) pour introduire l’AQ dans les transports terrestres. Au sein de la Commission Inter-gouvernementale pour le Tunnel sous la Manche, j’ai obtenu l’interdiction du transport de matières dangereuses au cours de négociations multi-acteurs franco-britanniques.

Ensuite, pendant 25 ans chez EDF, j’ai œuvré successivement à la Direction de l’Équipement, à la Direction de la Stratégie (Études Économiques Générales) et dans les Services Économie et Stratégie du Pôle Production. J’ai notamment : dirigé la maîtrise d’ouvrage déléguée ou la maîtrise d’œuvre de la construction de centrales électriques au Europe, Afrique, Moyen-Orient, Asie et Amérique pour un montant cumulé de 2G€ ; orienté, pendant vingt ans, les programmes de R&D pour la production thermique ; coordonné pendant quinze ans le programme de captage de CO2 de l’ensemble du groupe EDF et contribué à la mise en place, à Bruxelles, du système européen de quotas d’émission de CO2 ; représenté la production thermique d’EDF auprès d’EURELECTRIC, de la Commission Européenne et de la plate-forme technologique ZEP (Zero Emission Platform). J’ai également assuré pendant quinze ans la vice-présidence de l’association européenne de producteurs d’électricité VGB-PowerTech, à Essen en Allemagne, dont j’ai présidé le directoire technique.

Depuis 2018, je suis consultant chez ARCLÈS, Directeur associé en charge de la coordination des secteurs mines, énergie et environnement.

J’ai ponctué mon activité professionnelle d’une cinquantaine de communications en congrès internationaux et publications dans des revues techniques ou professionnelles en français, anglais et allemand.

Enfin, depuis 25 ans, j’anime le Club Mines-Énergie qui organise des conférences et publie des dossiers relatifs à l’énergie 

Quelles sont vos expertises au sein d’ARCLÈS ?

Je partage avec les clients d’ARCLÈS mes cinquante ans d’expérience internationale, consacrés : au management d’équipes ; à la conduite de l’innovation et du changement ; à la politique industrielle et au pilotage de projets de la chaîne de valeur de l’énergie, dans le respect de l’environnement.

Je suis intervenu tour à tour depuis les quatre sommets d’un tétraèdre que sont l’innovation industrielle, l’exercice de la fonction régalienne d’autorité, l’industrie et la finance, très souvent dans les négociations en interface avec les autres sommets. Connaître le métier et la manière de penser de mon interlocuteur, pour les avoir pratiqués à son âge, est un atout majeur que je mets au service de mes clients et de leurs projets.

Quels sont ou ont été vos principaux défis professionnels ?

a) Réduire de 6 mois le temps de développement par la SNECMA d’un compresseur de moteur d’avion à réaction, grâce à un programme d’optimisation de l’équilibrage de la puissance, tournant en trois minutes de calcul ;

b) Maîtriser le tryptique ‘qualité, coûts, délais’ sur des projets de construction de centrales électriques, après concertation avec les parties prenantes pour en obtenir l’acceptabilité ;

c) Assurer la maîtrise d’ouvrage puis réussir le démarrage du pilote industriel et de recherche de captage du CO2 du Havre ;

d) Enseigner pendant quinze ans à l’École du Pétrole et des Moteurs (EPM-IFPEN) l’ingénierie réservoir ; apporter aux étudiants la preuve qu’ils étaient capables de découvrir par eux-mêmes la matière enseignée en les envoyant exclusivement faire des exercices au tableau ;

e) Co-construire et animer un Comité de Mission au sein d’une start-up deep-tech, issue de la recherche de l’École des Mines, au service de la pérennité d’exploitations agricoles et de la production de carburants moins carbonés ;

Quelle est votre philosophie dans la vie, dans le travail ?

Dans la vie, comme dans l’exercice de mon activité professionnelle, je cherche à donner un sens à mon action en référence au mot allemand « Beruf » (profession). Ce dernier dépasse les seules notions de profession et de métier pour les enrichir de celles d’appel voire de vocation ; développer ses propres talents et ceux de ses rencontres au service de ce qui donne un sens à la vie de chacun, que ce soit plus orienté vers l’esthétique, le développement scientifique ou l’efficacité opérationnelle.

Si vous deviez choisir un mentor, qui choisiriez-vous et pourquoi ?

Sans remonter à Henri Fayolle, dont le texte fondateur du management publié en 1916, Administration industrielle et générale, a été traduit en douze langues, j’ai eu la chance de côtoyer Pierre Laffitte

Ce grand organisateur visionnaire a été l’architecte : du BRGM, qu’il a structuré en EPIC ; de la structure ARMINES, outil de recherche partenariale de l’École des Mines avec l’industrie, précurseur des instituts CARNOT ; de la Conférence des Grandes Écoles et de la technopole Sofia Antipolis. Directeur de l’École des Mines, il y apporte un souffle nouveau en développant les partenariats industriels ainsi que des passerelles avec les universités à tous les niveaux et réussit le pari d’y implanter un centre de sociologie. Pour illustrer sa virtuosité à innover en fédérant industries, administrations et chercheurs, ses mémoires s’intitulent : L’action est la sœur du rêve.

Quelles sont vos passions et hobbies dans la vie ?

Je suis mû par une soif inextinguible de comprendre ce qui sous-tend et anime les hommes, leurs cultures, leurs langues, leurs aspirations et les mécanismes de tous ordres auxquels ils se confrontent.

J’effectue des itérations incessantes entre théorie et pratique, tant dans l’action que dans le partage d’expérience sur un champ vaste, depuis la thermodynamique jusqu’au coaching de dirigeant. Voir démarrer, ici et maintenant, un système que j’ai initié m’apporte les plus grandes satisfactions. 

La croisière hauturière à la voile jusqu’au-delà du cercle polaire est un champ de mise en pratiques humaine et matérielle sans égal dans l’immensité d’espaces magnifiques parsemés d’icebergs et ponctués de fugitifs souffles de baleines.

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